C’est la faute des profs …
Ce 7 mai au matin, alors que les professeurs s’apprêtent à entrer en classe, Elisabeth Borne renoue avec la longue tradition du profbashing et du mépris des personnels de son ministère. Elle s’inscrit dans la droite ligne de ses prédécesseurs et d’Emmanuel Macron qui, pour se sentir exister vient de dégainer l’arme de la consultation citoyenne contre les rythmes scolaires.
Dans cette interview, nous apprenons qu’il n’y a pas assez de filles dans les filières scientifiques et que c’est la faute des profs, mais aussi que Madame 49.3 a la solution.
Mais que disent les chiffres 1?
Depuis 1962 et jusqu’à 2021, la part des baccalauréats scientifiques dans l’ensemble des baccalauréats se maintient globalement autour de 50%, et, la part de bachelières scientifiques progresse régulièrement pour passer de 36,3% à 47,9% à l’aube de la réforme, soit près d’une sur 2 reçu.es. Et puis, vient la catastrophe du bac Blanquer, la part des bacs scientifiques dégringole de 50% à 27% et les bachelières ne compte plus que pour 35,9% des lauréat.es scientifiques.
Alors soyons clairs, non, ce n’est pas la faute des profs ou de leur manque de formation qui est la cause du manque de filles dans les filières scientifiques mais bien, la réforme de son prédécesseur qui en est la raison. Parce que depuis 1962, les professeur.es ont fait le job pour que la part des filles dans les filières scientifiques progresse et les chiffres le prouvent !
On va former les profs
La ministre a donc trouvé la solution : on va former les profs.
“Cette formation visera à analyser les gestes professionnels, faire prendre conscience des risques de reproduction involontaire qui apparaissent par exemple dans la gestion des prises de parole en classe ou dans les appréciations portées sur les bulletins scolaires2.”
Cela fait des décennies que les professeur.es travaillent sur les stéréotypes de genre que semble découvrir Elisabeth Borne et qu’ils mettent en œuvre des stratégies qui ont fonctionné pour promouvoir les sciences auprès des filles et ce jusqu’au … cataclysme Blanquer.
Et, que dire, madame la ministre, de l’inégalité institutionnelle femmes-hommes qui sévit au sein de l’Education Nationale ? Ce serait par choix que les femmes décident d’être moins payées que les hommes ? Par choix encore qu’elles préféreraient être assignées aux premières classes du secondaires plutôt qu’affectées dans le cycle terminal et les CPGE ? Et bien, il n’en est rien ! C’est parce que votre administration préfère leur mettre des règles de gestion dans les roues de l’avancement de carrière au profit des hommes.
Et, pour votre solution magique, afficher une charte dans la salle des personnels, il ne nous reste plus de mot.
Les vrais problèmes de l’Éducation Nationale
Les vrais problèmes de l’Éducation Nationale, ils ont été identifiés, analysés :
- le manque d’attractivité du métier en raison de sa trop faible rémunération ;
- le bricolage incessant à coup de réformes et de contre réformes qui font que depuis 2021, chaque session du baccalauréat a eu ses modalités et épreuves propres ;
- des dotations horaires en décroissance pour augmenter le niveau car, c’est bien connu, on fait toujours plus avec toujours moins ;
- les effectifs par classe les plus chargés d’Europe ;
- …
Nous arrêtons ici la liste que vous connaissez si bien, tant les observatoires de JM.Blanquer, la DEPP, le Sénat et d’autres institutions en ont déjà fait la liste en la documentant.
Et, votre plan, sur 4 ans, il ne fonctionnera pas sans le rétablissement des volumes horaires décents pour chaque matière et la possibilité de travailler en groupe restreint dans les matières scientifiques qui nécessitent de la manipulation et de la fabrication. Votre plan ne donnera aucun résultat probant, alors que vous avez déjà prévu de supprimer des postes à la rentrée 2025 et de baisser votre budget pour l’année 2026.
Si l’École tient encore, c’est grâce à l’ensemble de ses personnels et votre mépris renouvelé, ne fait que la précipiter plus rapidement dans l’abîme.